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Interview

Interview de Jennifer Maumont, co-fondatrice de la marque de mode responsable JULES & JENN

Dernière mise à jour :

Rencontrez Jennifer Maumont, cofondatrice de JULES & JENN, une marque française de mode responsable qui redéfinit les codes de l’industrie avec audace et transparence.

Ancienne directrice marketing chez Dior Couture, Jennifer a quitté le monde du luxe pour entreprendre un tour du monde familial, un véritable déclic qui l’a menée à embrasser la Slow Fashion. En duo avec son mari Julien, elle a fondé une marque emblématique, valorisant l’artisanat européen, la traçabilité, et la fabrication locale.

Découvrez son parcours inspirant, ses défis dans le secteur de la mode éthique, et sa vision d’une consommation plus consciente et durable.

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Si nos lectrices devaient connaître trois choses sur vous et votre parcours entrepreneurial, que leur diriez-vous ?

  1. La mode a toujours été mon domaine de prédilection : petite fille de tanneur dans le sud de la France, j’ai débuté dans le conseil en stratégie avant de devenir directrice marketing chez Dior Couture. J’ai ensuite créé une première marque de chaussures en solo puis JULES & JENN en duo, et n’ai jamais quitté cette passion pour le produit depuis.
  2. L’entrepreneuriat est pour moi une manière d’être plus libre et plus engagée. En 2014, alors que j’ai déjà des boutiques de ma première marque Eclipse, je commence à réaliser les dangers et l’absurdité de la Fast Fashion et ressent le besoin de faire une pause. Je quitte tout pour faire un tour du monde en famille. À mon retour, je décide de faire un virage à 180º vers la « Slow Fashion« , en créant la marque de mode responsable JULES & JENN.
  3. La famille est une valeur fondamentale pour moi, c’est pour ça que j’embarque à ce moment-là mon mari dans l’aventure de l’entrepreneuriat ! On décide de faire bouger ensemble les codes du secteur et d’opter pour la traçabilité et la transparence (quasiment inexistante à l’époque dans cette industrie !) en commençant par un nom de marque éponyme : JULES & JENN, alias Julien et Jennifer. 

Si vous deviez résumer JULES & JENN en deux phrases, que diriez-vous ?

C’est une marque française de mode responsable fondée autour d’un projet ambitieux : celui de créer une mode porteuse de sens. 

Nous défendons en toute transparence la « Slow Fashion » pour nos chaussures et accessoires, alliant fabrication locale, prix juste et artisanat européen, au service d’un style épuré et contemporain.

Quel est le principal défi que JULES & JENN s’est engagé à relever dans l’univers de la mode et de la consommation responsable ?

Notre principal défi est de proposer une mode responsable au prix le plus accessible possible. Dans le contexte actuel d’inflation, mais aussi de hausse des coûts des matières premières, c’est un réel challenge !

À quoi ressemble une journée type dans la gestion de JULES & JENN ?

Dans l’entrepreneuriat, il est très difficile de définir une journée type, car c’est très varié et tout va très vite ! Ceci dit, comme je pilote principalement la partie créa et marketing, mes journées sont rythmées par les sujets de branding et de produits sans oublier la topline et l’équipe ! 

Y a-t-il une rencontre ou un événement qui a été le point de départ de votre vocation dans la mode éthique ? 

C’est clairement notre tour du monde d’un an avec mon mari et mes deux enfants qui a été un véritable déclic. De ce voyage est née une envie, comme une évidence, de créer une marque de mode différente, qui milite en faveur d’une consommation modérée et plus raisonnable.

Quelles figures féminines ou parcours vous inspirent dans votre aventure entrepreneuriale ?

Il y en a beaucoup ! Mais je dirais tout d’abord Mercedes Erra, qui dirige l’une des agences de publicité les plus créatives au monde. Depuis toujours, elle promeut l’égalité hommes/femmes au sein des entreprises, elle fait de chacune de ses prises de parole une occasion de semer ses convictions et c’est son côté précurseur que j’admire.

Il y a aussi la sportive Clarisse Crémer qui n’a pas hésité à prendre le large pour vivre sa passion à bord de différents voiliers monotypes. Pour moi, elle incarne à elle seule cette génération de marins très talentueux qui a aussi la capacité de partager de manière enjouée et authentique ses aventures avec le public.

Enfin, il y a Vandana Shiva, écrivaine et militante féministe indienne, connue pour sa lutte médiatique contre les OGM. Je la trouve extrêmement charismatique et ses combats pour une agriculture raisonnée m’inspirent dans mes réflexions pour construire une mode plus responsable.

La force de son message est de montrer que des problèmes précis comme le brevetage des semences ou la privatisation de l’eau ont des impacts bien plus vastes tels que les violences envers les femmes ou certains conflits récents. 

Qu’est-ce qui vous motive à poursuivre ce projet, même face aux défis du secteur de la mode ?

On assiste aujourd’hui à un inexorable déclin des secteurs de l’habillement et de la chaussure, et il n’y a pas une semaine sans que l’on apprenne que l’une de nos marques amies dans la mode responsable ferme ses portes.

C’est ce contexte difficile qui nous pousse à mettre les bouchées doubles pour que le marché ne soit pas dominé seulement par quelques géants de la Fast Fashion

Quels ont été les plus grands obstacles rencontrés dans le développement de JULES & JENN, notamment concernant la transparence des coûts et la fabrication locale ?

Au niveau de la transparence, il est vrai que nous nous sommes toujours attachés à partager systématiquement l’information avec nos clients, en fournissant une description détaillée des produits, le type et origine des matières, le lieu exact de fabrication, les photos des ateliers partenaires ou encore détail des coûts.

Ceci implique une mise à disposition des informations de la part des ateliers qui est primordiale, et à l’époque où ces pratiques étaient très minoritaires dans le secteur, le choix des usines était assez compliqué.

Au niveau de la fabrication locale, bien entendu, produire en France, Italie, Espagne ou Portugal comme nous le faisons, implique que nous travaillions avec des marges très réduites.

Si l’on ajoute à cela l’augmentation des coûts des matières premières, la baisse du pouvoir d’achat en France (qui fait que beaucoup de personnes soient attirés par la promotion et les bas prix), ou le “Greenwashing” ambiant, il est difficile de se faire une place et de la garder.

Mais nous savons aussi que les consommateurs veulent consommer mieux, et même si en 2024, seulement 12% des Français achètent des articles de mode éthique tous les mois, ils sont 64% à en acheter au moins une fois dans l’année, il y a donc un espoir !

Comment avez-vous surmonté ces obstacles pour rester fidèle à vos valeurs ?

Pour maintenir la transparence, nous restons très exigeants pour le choix de nos ateliers-partenaires, matières premières et fournisseurs en général.

Quant à la fabrication locale, nous continuons à fabriquer exclusivement dans les 4 pays dont je vous ai parlé, dans des ateliers maîtrisant le meilleur savoir-faire traditionnel, sans jamais faire de soldes pour maintenir un prix juste toute l’année.

Enfin, au niveau de la collection, nous pensons intemporalité avant tout, car notre but est de créer des pièces durables, par leur qualité et par leur style. 

Source : Instagram @jules_jenn

Source : Instagram @jules_jenn

Source : Instagram @jules_jenn

Si vous deviez briser trois mythes sur la mode éthique ou la consommation responsable, quels seraient-ils ?

Mythe 1 : La mode éthique est trop chère

Il faut réfléchir en nombre de fois où un vêtement est porté plutôt qu’en prix d’achat : un article qui dure 5 ans revient moins cher qu’un vêtement qui dure 5 lavages ! 

Mythe 2 : La mode éthique est barbante !

C’était le cas à ses débuts, mais aujourd’hui des marques très créatives et innovantes embrassent aussi une démarche complètement responsable, comme JULES & JENN !

Mythe 3 : La mode éthique manque de choix et de variété

Ceci n’est plus le cas aujourd’hui : avec la demande croissante de mode éco-responsable, le marché propose désormais une large gamme d’options pour tous les styles et toutes les occasions, et certains sites comme The Good Goods ou Marques de France se chargent de les répertorier pour nous.

Comment évaluez-vous l’impact de JULES & JENN sur les comportements de vos clients et sur l’industrie de la mode en général ?

Nos clients sont déjà très familiarisés avec les enjeux de la protection de l’environnement et la préservation des savoir-faire, mais nous leur fournissons le plus d’informations possible pour qu’ils puissent faire leurs choix en toute conscience.

Nous sommes aussi là pour démontrer que la mode et la solidarité ne sont pas deux mots ennemis. Par exemple, nos Fins de Série Solidaires leur permettent de soutenir directement par leur achat l’association Mode Estime, un atelier de réinsertion par la couture situé en Seine-Saint-Denis.

Concernant l’impact de notre entreprise sur l’industrie de la mode, je pense qu’il doit prendre la forme d’un lobby vertueux pour que notre secteur réduise ses émissions de CO2, mais nous ne pouvons pas faire cela tout seuls.

Nous faisons partie du collectif En Mode Climat, une coalition d’acteurs du textile qui milite pour une législation contraignante qui oblige les marques à adopter un modèle de production plus raisonnée. 

Pourquoi est-il crucial de redéfinir les standards de la mode avec des valeurs comme la transparence et le refus des soldes ?

Parce que malheureusement, il y a aujourd’hui un avantage économique à produire de manière irresponsable, une sorte de « prime au vice » que nous dénonçons fermement.

Il est important de rappeler qu’acheter un t-shirt neuf à 4€, c’est tout sauf une bonne affaire, car derrière les prix cassés se cache une triste réalité écologique et humaine : des consommateurs qui achètent ce dont ils n’ont pas besoin, un environnement qui s’épuise et des travailleurs qui peinent à être rémunérés décemment. 

À quel moment avez-vous décidé d’intégrer des points de vente physiques, et pourquoi ?

Notre marque est née en 2016 comme une DNVB, donc uniquement disponible en ligne, car nous ne souhaitions pas avoir d’intermédiaires.

Ceci dit, nous avons décidé de répondre à la demande croissante de nos clients d’essayer nos chaussures en boutique, notamment après le COVID-19. Nous avons donc tissé des partenariats avec les Grands Magasins dans toute la France.

Après le bel accueil d’une sélection de souliers femme au Printemps en 2021, puis aux Galeries Lafayette l’année suivante, c’est au BHV Marais que nous avons pris place en 2023.

Puis la collection homme a débarqué dans plusieurs temples de la mode, notamment au Printemps Haussmann, à partir de septembre 2023. Aujourd’hui, nous sommes également distribués chez Altermundi à Paris et à Bordeaux, un des pionniers français du marché des produits responsables.

Quels outils ou stratégies utilisez-vous pour garantir la qualité et la durabilité des produits, tout en restant accessibles ?

Pour la qualité, rien de tel que de choisir les meilleurs ateliers d’Europe, chacun spécialisé dans un savoir-faire traditionnel. Nous travaillons principalement le cuir, la matière la plus robuste qui existe à ce jour pour des chaussures, et nous nous appuyons sur des labels et certifications pour nos matières, en veillant toujours à la traçabilité.

En parallèle, vu que nous nous inscrivons dans une démarche « d’éco-conception » (qui consiste à intégrer l’impact environnemental dès la conception d’un produit, puis lors de toutes les étapes de son cycle de vie) nous explorons toujours de nouvelles alternatives au cuir, comme la fibre de pomme ou le PET recyclé.

Quels conseils donneriez-vous à celles qui envisagent de se lancer dans l’entrepreneuriat dans le secteur de la mode éthique ? Quels écueils éviter ?

Pour moi, entreprendre, c’est oser “désapprendre”, sortir de sa zone de confort, ne pas être inhibée par la peur de l’échec, apprendre de ses erreurs. Il y aura toujours des gens pour vous dire de ne pas y aller, alors foncez !

Vous entreprenez en couple. Quels sont les avantages et inconvénients ?

Pour les avantages, c’est la confiance mutuelle, le soutien inconditionnel, la complémentarité et avoir une passion commune qui nous anime. Coté inconvénient, on parle un peu trop boulot à la maison, mais on se soigne…

Auriez-vous des ressources, lectures ou inspirations à partager pour les femmes qui rêvent de réinventer l’industrie de la mode ?

J’aime bien observer les autres industries pour me nourrir au quotidien. Donc aller au ChangeNow chaque année, suivre des personnalités engagées comme Julia Faure en France ou lire les rubriques innovations des blogs et journaux économiques font partie de mes sources d’inspiration.

Quelles sont les prochaines étapes pour JULES & JENN et vos ambitions pour son développement futur ?

Notre ambition est de continuer à promouvoir haut et fort la « Slow Fashion » comme mode de consommation raisonnée, et nos prochaines étapes sont la consolidation de notre présence en retail et l’internationalisation de la marque.

L'équipe Les Pionnières

Composée d'entrepreneures et entrepreneurs, de passionné.es d'éducation, l'équipe Les Pionnières vous fait profiter de son expérience dans ces domaines.

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